CAN 2015 : bilan du 1er tour

Fin de la première phase de cette CAN, on connaît désormais les quatre affiches des quarts de finale qui débuteront samedi. On en a une fois de plus eu la confirmation, en Afrique rien n’est vraiment prévisible et un peu près rien ne s’est déroulé comme on l’avait prévu… Retour sur ces dix premiers jours de compétition.

Si rien n’a été prévisible au niveau des résultats, il y a quelques certitudes qu’on peut dégager :- On rigole bien souvent des performances des gardiens africains. C’est vrai qu’ils se montrent parfois maladroits, on a eu droit à quelques boulettes de premier choix (Yattara de la Guinée ou Sanou du Burkina) mais cela arrive tout autant aux gardiens européens (par exemple aux Anglais). Non, ce qui a beaucoup plus fait rire ce sont les ratés des attaquants, car on en a vu une ribambelle.
– Il est vrai que lorsque le pays hôte n’est pas sur le terrain, les gradins sont bien souvent clairsemés à la CAN. Pas cette année ! Le président-dictateur Obiang a pris les choses en main en exhortant ses compatriotes à se rendre au match quitte à leur offrir des billets à Mongomo et à Ebibiyin. Pas de liberté d’expression mais des billets de foot gratuits. Ça c’est du programme politique !
– On pensait naïvement que ça n’allait pas être le cas après le match d’ouverture. Mais finalement le pays hôte a bien eu droit à son coup de pouce avec ce pénalty généreusement accordé au Nzalang Nacional pour une faute peu évidente lors du dernier match face au Gabon. Depuis la création de la CAN à 16 équipes, l’organisateur a toujours passé le 1er tour…
– Le match nul a été roi sur le continent africain et spécialement le 1-1, dont la cote ne devrait désormais pas dépasser le 1.005. Tenez, plus de la moitié des matchs se sont terminés par un nul, si ça c’est pas de la statistique qui prouve cette compétition est très serrée.
– Le foot africain est décidément physique et engagé. On a une fois de plus eu droit à des tacles très-très appuyés qui feraient passer Roy Keane pour une pédale. La palme revient sans doute au défenseur malien Adama Tamboura, un physique de camionneur qui déménage la plupart de ses adversaires qui sont généralement plutôt costauds eux aussi.
– Qui dit jeu physique, dit blessures à gogo et forcément interventions répétées des soigneurs qui ont eu fort à faire tout au long de la compétition. La première intervention surgit dans la majorité des cas durant la première minute de jeu. Les défenseurs africains ont très bien intégré le fameux discours de l’entraîneur qui dit qu’au premier duel tu dois faire mal pour montrer qui c’est le patron.
– Il y a toujours des matchs à s’ouvrir les veines. Je ne sais pas pour vous, mais personnellement je suis décédé à la 41e minute de Guinée Equatoriale-Burkina. Ah non vous avez probablement zappé sur un bon vieux Télé la Question et vous avez eu raison.

Groupe A :

Le résumé : 
Ce groupe portait le nom de groupe de la vie tant il n’était pas de la mort du tout. On pensait que le Burkina et le Gabon sortiraient sans problèmes de ce groupe, et bien on s’est sacrément fourvoyé ! Bien au contraire, les deux gros sont sortis par la petite porte et les deux petits ont pris le quart. Le Congo a créé la véritable sensation en virant en tête de ce groupe. Formation totalement inexpérimentée, les Diables Rouges de Claude Le Roy ont surpris tout le monde et n’ont pas volé leur qualification. La Guinée Equatoriale n’a pas démérité, car elle a montré une sacrée envie surtout pour une équipe qui ignorait encore qu’elle organiserait et participerait à la compétition il y a deux mois. Il faut néanmoins avouer que le Nzalang Nacional est relativement limité du point de vue du jeu et a finalement été un peu aidé par les décisions arbitrales lors du match couperet face au voisin gabonais. Du jeu, c’est en revanche ce qu’ont proposé le Burkina et surtout le Gabon qui ont largement plus joué au ballon et plus tiré au but que leurs deux adversaires de groupe. Mais à force de faire des fioritures et de galvauder leurs opportunités, les Etalons et les Panthères repartent la queue entre les jambes.
Le moment africain :
Il reste environ cinq minutes de jeu lors de la rencontre entre le pays hôte et le Gabon, Ibán Edu, un Espagnol notoire, inscrit le second but du Nzalang Nacional qui est synonyme de qualification historique pour les quarts. A ce moment précis tout le stade de Bata entre en liesse et les remplaçants ne tiennent plus en place sur le banc de touche et se mettent à danser et à chanter sur le long de la touche durant les minutes restantes jusqu’au coup de sifflet final où tout le monde laisse exploser sa joie. Une sacrée joie qui fait plaisir à voir, même si elle intervient sur fond de pénalty très discutable, sans parler des joueurs naturalisés à la va-vite…
Le héros :
La qualification historique du Nzalang tient beaucoup à sa combattivité, à son esprit d’équipe, à son public, aux décisions arbitrales favorables et à son… gardien Felipe Ovono. Le gardien de 21 ans est un des grands bonhommes de cette qualification. Irréprochable durant les trois rencontres, ce gardien totalement inconnu qui évolue au pays (au Deportivo Mongomo, la ville du stade tout pourri) a été exemplaire notamment face au Gabon. Pas mal pour un mec qui doit sans doute gagner moins d’argent qu’un étudiant travaillant deux semaines par année durant ses vacances. 
Le zéro :
Si le Burkina mérite son flop, on préfère attribuer ce titre au duo offensif gabonais Aubameyang-Bulot qui promettait des étincelles. Au final, les deux compères qui ont la même coupe de cheveux que Neymar ont surtout brillé par leur manque de réalisme. Et dire qu’ils étaient partis en fanfare en disposant 2-0 du favori du groupe…

Groupe B :

Le résumé : 
Avec cinq matchs nuls en six rencontres, le groupe B ne fut pas joli-joli à voir. Ce fut même carrément très chiant lors du 0-0 entre le Cap-Vert et la RDC. Auteure de la seule victoire du groupe la Tunisie s’est contentée de jouer de temps en temps 15 minutes par-ci par-là, ce qui suffit amplement à Chikhaoui et ses amis pour s’offrir un quart face à l’hôte du tournoi. Le deuxième qualifié est la RDC qui n’a pas gagné le moindre match et qui ne s’est pas montrée irrésistible. Loin de là, on a plutôt été déçu. Il va falloir montrer un autre visage lors du derby des Congo en quarts. La Zambie qui était diminuée par les blessures (Katongo) a fait preuve de belles phases de jeu mais s’est montré peu concentrée et a raté plus de montagnes que ses adversaires. En inscrivant un seul petit but, le Cap-Vert ne pouvait guère espérer rééditer l’exploit d’il y a deux ans, un tournoi bien discret de la part des Requins Bleus.

Le moment africain :
L’Afrique c’est tout sec et il fait toujours chaud. Oui, mais non pas partout, et surtout pas en Guinée Equatoriale. Forcément situé sous l’Equateur, on a plutôt droit à un climat humide avec des averses tropicales (pas des trucs de pédés). Démonstration au début de la deuxième de Zambie-Cap Vert disputé à Ebibiyin, un véritable déluge s’abat sur la rencontre qui se transforme tout d’abord en match de waterpolo puis en démonstration de natation synchronisée. Du mythique, en Europe on aurait à coup sûr interrompu le match.
Le héros :
On ne va pas vous cacher qu’on aurait voulu nommer Robert Kidiaba, le gardien de la RDC qui en plus de faire la danse du cobra, d’avoir une coupe improbable et un tic de clignement des yeux a disputé une excellente phase de poule. Il est d’ailleurs devenu mon idole. Alors on se rabattra sur le « zurichois » Yassine Chikhaoui, lui aussi excellent, qui amené ce qu’il fallait de folie à une presque trop sobre équipe tunisienne.
Le zéro :
Les Léopards se sont qualifiés pour les quarts avec trois points, sans la moindre victoire et deux petits buts marqués. Pas à la hauteur des espoirs que nourrit cette équipe à notre sens. Dieumerci Mbokani n’a même pas dû réussir à cadrer la moindre frappe dans ces trois rencontres et s’est montré franchement trop nonchalant, on attend beaucoup plus d’un attaquant d’une telle stature et surtout possédant une si grosse bouche. Bon on lui pardonne, il a tout de même délivré la passe de but permettant l’égalisation synonyme de qualification face à la Tunisie.

Groupe C :

Le résumé : 
Tout s’est joué lors de la dernière journée où les deux grands favoris du groupe ont finalement passé l’épaule. Les Fennecs ont assuré pépère leur qualification, malgré un petit contretemps de la dernière minute face au Ghana, et ont justifié leur statut de favori incontestable au titre final. Meilleure attaque du tournoi, cinq buteurs différents, solidité défensive, l’Algérie sera difficile à sortir. Seul petit bémol elle termine deuxième de son groupe, ce qui n’est pas une bonne affaire. Les Blacks Stars ont bien galéré pour parvenir à une qualification arrachée dans le dernier quart d’heure du dernier match. L’absence de Gyan lors du premier match face au Sénégal pour cause de malaria s’est bien fait sentir. Comme par hasard, le retour du capitaine a signifié le retour de la victoire. Le Sénégal n’est pas passé loin de l’exploit. Dommage les Lions de la Teranga ont montré un visage intéressant et auraient mérité un meilleur sort. Nul doute que dans un autre groupe, une qualification aurait été au bout. L’Afrique du Sud a présenté un jeu séduisant et était peut-être l’équipe qui jouait le mieux au ballon du tournoi. Pas de bol, les Bafana-Bafana ne savent pas garder un résultat et se sont à chaque fois fait remonter au score. Une élimination par inexpérience et naïveté somme toute logique.
Le moment africain :
Lors du derby des équipes préférées de Canal, une scène bien cocasse s’est produite. Sur un corner du début de deuxième mi-temps, le rugueux défenseur Carl Medjani s’accroche tellement fort au maillot de Mame Diouf que le col du maillot du joueur sénégalais craque et se déchire sur une jolie longueur. Il y avait un tirage de maillot tellement gros qu’il y avait de quoi siffler deux pénaltys, ce que s’empresse de signifier à l’arbitre l’attaquant des Lions de la Teranga. Face à ce col en lambeaux Monsieur Rajindraparsad Seechurn ne bronche pas et envoie l’attaquant péter. Par contre, dans la foulée il avertit Diouf pour avoir changé de maillot sans autorisation et indirectement pour se venger de l’avoir mis face à son erreur. L’arbitre africain sait être très fiscal … quand ça l’arrange!
Le héros :
On hésite entre les capitaines des deux équipes qualifiées Gyan et Bougherra. Pour une fois privilégions les joueurs à vocation défensive. Considéré comme rugueux, voire même comme un sale type par certains, Madjid Bougherra est le vrai patron des Fennecs. Rugueux peut-être, mais c’est un mec qui donne tout pour son équipe et qui n’hésite pas utiliser tous les subterfuges pour arriver à ses fins. Il est pour l’instant probablement le meilleur joueur de la CAN tant il ne lâche rien à l’adversaire.
Le zéro :
Difficile d’attribuer un flop dans ce groupe où la logique a été respectée, ce qu’on vit très mal quand on aime le chaos. On décernera le titre de zéro par souci d’équité avec le point précédent au capitaine des Bafana-Bafana, Dean Furman. Menant trois fois au score, les Sud-Afs se sont à chaque fois fait rejoindre dans la dernière demi-heure. Un mental digne du Milan AC face à Liverpool en 2005.

Groupe D :

Le résumé : 
Si on veut être méchant (ce qu’on aime bien), on peut résumer ce groupe par une seule phrase : il y a eu 1-1 sauf à Côte-d’Ivoire – Cameroun. Guinée et Mali étant à égalité parfaite à la deuxième place, la magie du règlement a opéré et un tirage au sort a été effectué pour déterminer qui accompagnerait les Eléphants en quarts. A ce petit jeu, c’est la Guinée qui a tiré son épingle du jeu. Une qualification amplement méritée tant la boule guinéenne a dominé la boule malienne dans le saladier. Beaucoup plus mobile et roulant tout simplement mieux que la boule malienne, c’est logiquement que la boule guinéenne a été couronnée de succès. Un grand bravo au Syli National qui ressort gagnant du Hilton de Malabo et s’offrira un quart face au Ghana. Pas de chance pour le Mali, véritable martyr de cette CAN. Enfin, le Cameroun a une nouvelle fois déçu, les Lions Indomptables ont été tout au plus des Chats Indomptables, ceux un peu agressifs qui font la loi dans le quartier mais qui se pissent dessus dès qu’il faut aller chez un vétérinaire.
Le moment africain :
Côte-d’Ivoire – Mali, deuxième mi-temps, les Aigles du Mali mènent 1-0. Depuis un certain temps, les Maliens gagnent systématiquement du temps sur chaque action, c’est de bonne guerre. Survient alors la classique blessure de gardien, le truc qui te fait gagner presque 10 minutes et qui est arrivé à presque la moitié des gardiens de cette CAN. Le gros gardien malien Soumbeïla Diakité se claque, mais forcément il n’allait pas juste se tenir derrière la cuisse et demander le changement. Afin de gagner le plus de temps possible, le poids lourd malien met alors en place un de ces cinémas franchement comique. Entre roulades à terre et évacuation laborieuse en civière du beau bébé qui doit faire près de 100 kilos, il y avait de quoi rire.
Le héros :
Remplaçant au départ, Max Gradel a été l’homme providentiel des Eléphants de Côte-d’Ivoire. Sauveur des derniers instants face au Mali et unique buteur face au Cameroun, le joueur de St. Etienne a été décisif et a empêché les hommes de Renard, le mec toujours en chemise blanche, de connaître une immense désillusion. 

Le zéro :
Comment ne pas nommer Gervinho, une des grandes stars de cette CAN qui a réussi l’exploit de se faire expulser lors de son premier match face à la Guinée. Oui, on peut parler d’exploit car pour te prendre un rouge à la CAN, il faut limite tuer un adversaire. Cette seule expulsion du premier tour ne soldera toutefois que par deux petits matchs de suspension, une sanction bien clémente si l’on pense au pétage de plomb de l’Ivoirien. Il pourra donc  être aligné dimanche dans le choc face aux Fennecs. On parie que tuer un adversaire sur un terrain de la CAN est passible d’un carton rouge et de 4 matchs de suspension si on fait ses excuses après ?

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