Croche-patte : l’idéal c’est l’idole…

Au fil des compétitons et des week-ends sportifs, tricher ou déconner sont devenus les mamelles d’un sport qui se nourrit des frasques de ses rejetons. Football, tennis, handball, athlétisme et j’en passe, aucune discipline n’est épargnée. Au sein de chacune d’elles, élites ou sans-grades se font prendre la main dans le sac de leurs fraudes ou de leurs fautes récurrentes. Nous, vulgaires passifs, observons, enregistrons et réinitialisons le disque dur de nos neurones anesthésiés par notre besoin de pain et de jeux et nous effaçons sans états d’âme les «abominabilités» de nos champions… pour mieux les aduler. Nous sommes nettement moins tolérants avec nos gosses ou nos voisins.

Ainsi, à l’ère du partout numérique, plus rien n’échappe à personne. Il est bien fini le temps où un obscur petit sans-grade moustachu à la mèche folle pouvait annexer la Pologne, où des camions remplis d’étoiles filantes jaunes pouvaient traverser les campagnes européennes où des cheminées crachaient leur fumée odorante sans que personne ne sache rien, ne voit rien, n’entende rien.
Dès lors, aussi cyniques qu’un patron de Formule 1 sur un banc de justice, aussi grossières que les dénégations d’un cigarettier, aussi indécentes que les silences des fabriquants de nos téléphones portables sur le travail des enfants, aussi pathétiques que les justifications des fabriquants de textile au Bangladesh, les péripéties des héros en short et en adidettes ou pire, en costume trois pièces, alimentent à la fois les colonnes des journaux, les écrans plasma, les brèves de comptoirs et posent inévitablement cette question aussi ridée qu’un vieux tronc…. «Comment surveiller, comment punir ? ».Evidemment, il n’est plus question d’utiliser la roue… c’est regrettable, parfois. La règle sur les doigts ou le tirage du lobe est passablement démodé… La prison a largement montré ses limites. Une sanction qui a la cote en ce moment c’est la suspension dont la durée est largement tributaire de circonstances dont la logique m’échappe un peu.
Je ne reviendrai pas sur la suspension du vampire urugayen. Avant lui, la mode avait déjà écrémé le café du commerce des décideurs. Ainsi, vous frappez un collègue ou un adversaire, vous écoperez de 12 matches (Joey Barton) ou sept mois et demi (Levan Kobiashvili), vachement important, le demi… Par contre, si les foudres de votre colère s’abattent sur un dirigeant ou un arbitre, le crime de lèse-majesté est avéré et là, vous écopez sévère : Nicolas Anelka, suspendu 18 matches pour ses insultes envers Raymond Domenech ou encore Pieter Rumaropen, un Indonésien suspendu à vie pour avoir frappé violemment un arbitre en février 2013. Il y a même des demi-mesures puisque si vous exprimez violemment à un journaliste tous les sentiments qu’a évoqués en vous le papier qu’il vous a consacré, c’est une année de suspension qui vous attend (Cyril Jeunechamp).

En clair, l’idée sous-jacente est de priver les garnements de leur jouet. Qui l’eut cru, le sport lui-même vomit quelques attitudes avec lesquelles on ne rigole pas. C’est dans l’air du temps, à défaut d’y être assis avec les défenseurs d’une idéologie quelconque, on met au banc de la société sportive ce qui s’approche de près ou de loin à du racisme et à un rappel du connu en matière de chemises brunes et de bottes à clous… Ainsi, Carlo Tavecchio, le président de la Fédération italienne de football suspendu six mois de toute fonction officielle pour les événements UEFA pour avoir tenu des propos racistes. Quant à Giorgos Katidis, joueur grec injustement méconnu, il a été suspendu de sélection nationale à vie pour avoir fait un salut fasciste lors d’un match avec l’AEK Athènes. Bah, le premier ira bronzer quelques mois avant de reprendre son activité et le second continuera sa révision historique en club… avec un peu de bol et la manie de Constantin de ramasser tout ce qui traîne, on devrait le retrouver du côté de Tourbillon ! Les ultras vont adorer… bander du bras, ça doit les changer cette toute puissance brandie à la face d’un monde amorphe. 
Même dans la bourgeoisie sportive on se fait taper sur les doigts. Ainsi, le joueur de tennis espagnol Guillermo Olaso n’a pas réussi à convaincre le TAS de sa bonne foi. A 26 ans, sa carrière est terminée parce qu’il aurait truqué un match en 2010 à Astana. Cinq ans de suspension et 25’000 dollars d’amende, tarif définitif. 25’000 $ ?… Rude… 
Comme d’hab., c’est de l’autre côté de l’Atlantique que nous viennent les idées les plus incongrues. En effet, la Fédération américaine de natation a suspendu Michael Phelps six mois après qu’il ait été arrêté pour conduite en état d’ivresse et excès de vitesse. Dans le genre ma-vie-doit-être-irréprochable-dans-et-en-dehors-du-terrain ils se posent un peu là, les étoilés jusqu’auboutistes… Je me réjouis déjà de savoir ce que vont écoper les stars du foot américain qui confondent leur femme avec un vulgaire sac de frappe.
Mais le plus cocasse est la réaction des supporters du FC Nuremberg qui n’ont pas apprécié la piètre performance de leurs idoles à Karlsruhe. Les fans ont contraint les joueurs à leur céder leur maillot. Bref, on punit, on punit mais il n’y a rien qui change vraiment… Excepté peut-être l’ascendance quotidienne de l’idolâtrie débile que la société accorde à des mecs qui développent juste des qualités supérieures à la moyenne pour… jouer.

Oui, pour jouer…
Et si on commençait par changer cela, l’idolâtrie…

Écrit par Pascal Trépey

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