Croche-patte : tout est bon dans le sport

Ce qu’il y a de fabuleux dans le sport, c’est qu’il ne se passe pas une semaine sans que cette activité, véritable fait social et portée aux nues depuis les premiers Jeux Olympiques, il y a plus ou moins 2’800 ans, colonise les pages sportives ET celles des faits divers des quotidiens. De plus en plus celle des faits divers, d’ailleurs !

A l’époque, le sport était une trêve pendant la guerre… aujourd’hui c’est l’inverse. Quand je pense qu’il y a encore de gros naïfs qui espèrent le sport comme un spectacle vivifiant, qui titille la fibre identitaire, une grand-messe laïque où il fait bon amener son gamin, histoire de forger, sur un banc, sur un siège en plastique ou simplement debout, dans une promiscuité revigorante et un brouhaha indescriptible, une complicité qui scellera le lien père-fils ou père-fille dans le métal précieux du partage. Loin, très loin du fanatisme écervelé de la grosse poignée de mono-neurone, dont les membres actifs et auto-proclamés «fans authentiques», probablement orphelins affectifs, n’utilisent le sport que comme exutoire à leur quoti… (ha non, je vais pas me répéter tout de même…).
Et ça se répand insidieusement, la connerie. Prenez le cyclisme par exemple et notamment ces trois faits divers pendant le dernier tour d’Italie, cette année :
– Un spectateur fait tomber Francesco Bongiorno peu avant l’arrivée.
– Le vainqueur de la même course, Michael Rogers, est harcelé par des spectateurs qui courent à côté de lui.
– Wout Poels arrache les lunettes d’un spectateur en pleine montée.

Soit, c’est l’Italie et, les pauvres sortent de près de vingt ans de Berlusconite aigüe, une maladie pas si rare que ça, très contagieuse et dont les métastases n’ont pas fini d’essaimer leur destructive et insidieuse tâche au sein même du pays sans lequel l’explication de la formation du monde serait toujours restée aux mains des bigots ; un pays sans lequel je n’aurais jamais connu l’extase dans mon enfance ni frôlé l’épectase à l’adolescence grâce à Astérix et Monica. Certes, les mêmes faits auraient très bien pu se passer sur les routes du TDF, gageons que nous n’attendrons pas très longtemps avant qu’un hystérique de service se fasse remarquer dans les Alpes ou dans les Pyrénées… 
Cela dit, il faut tout de même avouer que le football réunit à lui seul une bonne moitié de tous les imbéciles de la planète (– une moitié seulement ? la planète seulement ? – oui, je me surprends à l’optimisme, parfois). En son sein rond, le foot a ainsi réussi à nous offrir des spectacles d’une rare beauté. Ainsi, pêle-mêle et sans être exhaustif, nous pouvons faire remonter à la surface de nos consciences anesthésiées par le chant des sirènes endimanchée de la propagande FIFaïesque, quelques joyeusetés célèbres :
– Le désastre du Valley Parade, le 11 mai 1985 à Bradford, où une cigarette mal éteinte met le feu à des déchets accumulés sous une tribune en bois depuis des années : 56 morts et plus de 260 blessés
– Le drame du Heisel, le 29 mai 1985: 39 morts et plus de 600 blessés. On ne signale aucune victime parmi les joueurs cependant. Le match ? Il s’est joué ; perso, je ne me rappelle plus du score. Mais 29 ans plus tard, au mondial 2014, les spectateurs chiliens sans billet, qui ont tenté d’entrer en force dans le stade avant le match contre l’Espagne, n’ont sans doute jamais entendu parler des raisons de ce massacre.
– L’horreur de Furiani, le 5 mai 1992 : 18 morts, seulement, mais 2357 blessés tout de même. Record battu. 
Le lien entre ces badineries du football moderne ? A part ce mois de mai que d’aucun voyait joli, le fric voyons ! Y’en a kon caché la merde au chat en Angleterre, kon économisé sur la sécurité en Belgique, kon remplacé à la va-vite une tribune stable, mais qui avait l’inconvénient de ne pas contenir assez de sièges, par une construction en tubulures à la fois plus grande et plus que suspecte en Corse. C’est sympa le foot hein les gars ? Mais faire de l’anticapitalisme primaire serait trop facile. C’est vrai quoi, la connerie humaine est pour beaucoup dans les comportements révélateurs de l’état d’esprit du sportif et du fan de base. A tout «saigneur» tout honneur, selon mon ami Wiki P., le football nous a légué le Hooliganisme, ce mouvement pacifiste qui a fait passer les membres du Ku Klux Klan (mais oui le KKK, vous savez, ces mecs blancs qui portaient leur phallus sur leur tête…) pour d’aimables artificiers en «mâle» de sensations fortes. Ces poètes n’ont pas leur pareil pour organiser des sorties entre potes. Le spectateur lambda les aime. Les CFF les adorent aussi.
A tous les échelons, quel que soit le pays, quel que soit le niveau, il n’existe pas un week-end sans que le foot ne fasse parler de lui dans la rubrique des chiens écrasés. Même dans notre pays si lisse, un pays qui adore fustiger les têtes qui dépassent à défaut de pointer du doigt les horreurs qui passent, des joueurs de ligues inférieures se tapent dessus, quand les mêmes ne poursuivent pas un arbitre jusque dans la rue, après le match, juste pour lui traduire leur mécontentement passager ; quand ce n’est pas les parents ou leurs juniors de rejetons qui entrent dans cette danse macabre que plus personne ne songe à mettre en question. Comme si la violence que draine le football était un mal nécessaire.

Le lien entre toutes ces décharges d’adrénaline ? Ben, la défaite. Quoique… «Après la victoire de la Colombie contre la Grèce au Mondial, la police de Bogota a décompté quelques 3’000 bagarres et 150 accidents routiers, ayant fait un bilan de neuf morts dans la capitale». On leur dit que leur équipe avait gagné ? Ou pas ?

Écrit par Pascal Trépey

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1 Commentaire

  1. Bravo pour cet article qui nous rappelle qu’en fait le sport de haut niveau c’est quand même un peu de la merde.
    C’est quand même le meilleur vecteur de cette idéologie qui consiste à considérer que quand t’as du pognon, non seulement tout t’est permis mais qu’en plus ça doit te faire rever.
    Psg et Bale sont 20 fois plus riches que leurs concurrents nationaux ?
    Et alors ça te fait pas rever tous ces beaux moments qu’ils te procurent quand ils en mettent 4 à Ajaccio ou à Lausanne connard de jaloux ?
    On voit bien que tu n’aimes pas ton pays sinon tu te réjouirais qu’ils portent haut les couleurs de ton pays en allant jusqu’en 1/4 de finale de coupe d’Europe.
    Arrete ton misérabilisme, ça interesse qui Lorient-Sochaux ou Aarau-Thune ?
    Toi ? Mais t’es qu’une m*** t’as pas de pognon !
    Allez j’suis sympa , t’achétes le maillot de Zlatan avec les 4 étoiles , comme ça tu contribues à ton rêve comme les autres .

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