Katia Clément : «C’est comme si on m’avait larguée par SMS.»

Alors que la finale de Coupe Suisse féminine de basket – seul match de la saison retransmis à la télévision – a vu la victoire d’Hélios sur Martigny, CartonRouge.ch a rencontré Katia Clément, joueuse octodurienne et de l’équipe suisse, non inscrite par SwissBasket aux qualifs’ de l’Euro 2015, ce qui a le don de l’irriter.

C’est chez elle, au centre de Martigny que Katia m’accueille. Pour parler basket bien sûr. La discussion commence doucement par une interrogation qui m’obsède. Le basketball, sport qui s’est pourtant largement globalisé et qui ne cesse de gagner en importance médiatique dans de nombreux pays, est en piteux état en Suisse. «Une des raisons est que le basket est fortement concurrencé en Suisse allemande par les autres sports en salle, le volley et le handball» nous explique Katia. Et il est vrai qu’un simple coup d’œil à la composition de nos championnats nationaux indique que les Latins sont très majoritaires.«Les clubs ont peu de moyens. Et la promotion dans les écoles, comme cela existait, avec un entraîneur qui venait faire une démonstration du sport, n’existe plus. De plus, les clubs manquent de bénévoles. Mais le basket n’est pas le seul sport concerné». Sans compter que la fédération suisse ne met pas vraiment le paquet pour promouvoir son sport : «Il y a Sefolosha qui a joué la finale NBA, Clint Capela qui arrive, mais la fédération ne se sert pas de leur réussite pour promouvoir le sport

Et apparemment, la fédération ne trouve pas grâce aux yeux de Katia. En effet, la décision prise par Swissbasketball de ne pas inscrire l’équipe sénior féminine aux qualifications de l’Euro 2015 passe difficilement. D’autant que la communication entre la fédération et ses internationales n’a de loin pas été irréprochable.
«2 jours avant le tirage au sort, je reçois un mail de la fédération, expliquant pourquoi ils ont décidé de ne pas inscrire l’équipe A féminine à l’Euro 2015. C’est comme si on m’avait larguée par SMS. D’autant que les joueuses ont fait beaucoup de sacrifices et d’efforts pour avoir l’honneur de représenter la Suisse. Personne n’a pris la peine de nous appeler ou de nous réunir pour nous expliquer les raisons de ce retrait. Et la nouvelle nous parvient juste avant le tirage au sort. Si on avait su ça, par exemple, dès juin, on aurait pu aussi rechercher des solutions.»
De plus, si elle peut entendre que le basket féminin est peut-être moins «bankable» que le basket masculin, elle estime que, niveau performance, les filles auraient eu de meilleures chances d’obtenir de bons résultats que les messieurs, dont l’équipe poursuit ses activités : «Il y a une telle différence physique, athlétique entre les joueurs suisses et ceux d’autres pays. Regarde la France, ils jouent tous en NBA, ils sont au top physiquement. Même en jouant bien, il n’y a aucune chance de régater. Cette différence physiologique est moindre chez les femmes. De plus, la génération actuelle est un groupe soudé dont les récents résultats ont été encourageants, et même loués par Swissbasket

Des performances louées donc, des espoirs de bons résultats, mais un retrait de l’équipe, motivé par des raisons économiques. «Il y a à la fédération des gens qui sont payés pour chercher des partenaires, des sponsors. La Ligue Suisse a trouvé un important contrat de sponsoring. Mais la ligue n’est pas la fédération. Eux, on dirait qu’ils n’ont même pas cherché
Les équipes féminines, en catégories d’âge, ont été maintenues. Et Swissbasket dément avoir abandonné son équipe fanion. Néanmoins, pour les jeunes internationales, le fait de ne pas avoir d’équipe A finira inévitablement par poser des problèmes de motivation. Pourquoi jouer en U-18 si l’objectif de jouer en senior est, au mieux, envisageable en pointillés ?
Sans compter que les internationales actuelles, déçues – c’est un euphémisme – par le manque de respect dont la fédération a fait preuve à leur égard, auront de la peine à s’investir auprès de Swissbasket une fois leur carrière terminée. La fédération, basée à Granges-Paccot, semble s’être tiré une monumentale balle dans le pied. Ainsi qu’à l’égalité homme-femme… «La fédération norvégienne s’est retrouvé dans le même genre de situation et a retiré ses deux équipes. La fédération suisse a sacrifié les femmes, mais conservé les hommes

Quant à ses projets futurs, Katia Clément indique que rien n’est encore décidé, mais que la possibilité de jouer une dernière saison sous les couleurs de son club formateur, le BBC Troistorrents, pour l’aider à remporter la promotion en LNA pourrait représenter un dernier défi intéressant.
Cette sympathique entrevue s’achève avec l’impression que les sacrifices et les efforts consentis par les joueurs/ses pour faire vivre leur sport ne sont simplement pas respectés par une fédération aussi bien gérée qu’une banque islandaise… Et ça aussi, ça participe à ce que le basket ne connaisse pas, chez nous, le même succès que chez nos voisins.

Écrit par Arnaud Antonin

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3 Commentaires

  1. De nouveau, un article fort intéressant sur le basket. Pour avoir côtoyé quelques années le basket féminin, je peux confirmer que les joueuses font de gros sacrifices pour pratiquer leur sport, et trouve affligeant le manque de respect de la fédération à leur égard.

  2. Merci pour cet article qui met en lumière les problèmes rencontrés par des sports « mineurs » dans notre pays mais met aussi le doigt sur ce qui semble bien être une grosse injustice, surtout au nom de l’égalité homme-femme.
    Bon courage à ces joueuses qui s’investissent à fond uniquement pour l’amour de leur sport!

  3. Pas d’argent pour l’équipe féminine nationale
    de basket,c’est fort dommage.Puis ce manque d’égard envers ces joueuses qui sacrifient pas mal de choses pour l’amour de ce sport au combien intéressant mais sous médiatisé en Suisse,puis au niveau structure et infrastructures c’est pas le top..Une des seules salles digne de ce nom est la salle à Fribourg.700 et 550 spectateurs pour les 2 premiers match de la finale des PO dans un canton qui a la culture du basket puis avec une équipe très forte cette année…décidément le basket ne fait pas recette en Suisse!Juste à Fribourg un peu plus quoique cela a aussi baissé cette année.

    Merci pour cet article et vive le basket!

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