My Tailor is complètement à la rue

Sans aucune majesté, les grands Britanniques fondent devant un Costa Rica ferme qui n’enfonce pas le clou. Ils quittent le Brésil la queue entre les jambes. Tandis que les Ticos la portent désormais en drapeau.

1. Le résumé.Les Costaricains refont le coup de la sérénité, déjà réussi deux fois en une semaine. Jeu court, exclusivement au sol, du dribble assuré et une mise en place solide.
Pour éviter de fâcher leurs futurs employeurs, ils renoncent à fumer les Anglais. En titularisant Randall «El Chiqui» Brenes, le Frédéric Chassot de l’isthme mésoaméricain, le sélectionneur protège ses aigles en faisant courir ses moineaux.
Loin des fanfarons helvètes qui se font sculpter des brosses à gogues sur les crânes et tatouer des prédateurs sur les avant-bras, les Ticos sont bien peignés, humbles, limite respectueux (si on excepte le très léger découpage de la cheville de Lampard par Miller, mais c’était sûrement de la maladresse). Un groupe de jeunes sans-grades polis qui regarde un empire sombrer, l’Immense Bretagne partir en sucette.
La partie est chiante comme un flic genevois pour n’importe qui qui n’est pas costaricain.
2. L’homme du match.
Moi. Dans un article qui a près d’un mois, je vous présentais mon pays, le Costa Rica. J’y narrais sans trop d’emphase le déroulement vraisemblable de la compétition pour les Ticos. La justesse du contenu de cette présentation ne peut mener le lecteur qu’à une seule conclusion et le contraint à m’acclamer debout devant son écran. J’attends.
Et Joseph Blatter qui a eu la sagesse de programmer ce match à 10 heures du matin, heure de chez moi, à San José. Ce qui m’a permis de vivre la partie au centre de la capitale costaricaine et d’apprendre comment on célèbre un triomphe dans un pays humble qui gagne proprement.

3. La buse du match.
Mon voisin devant le grand écran de la place de la République à San José au début du match. Je lui demande : «Pourquoi Tejeda, le numéro 6, se prénomme Yeltsin ?» Il répond : «C’est parce que c’est un prénom des Etats-Unis.»
C’est cela, oui.
4. Le tournant du match.
Peut-être la mi-temps. Durant laquelle les deux équipes ont changé de camp. Tout un bouleversement. On ne savait plus vers quel goal il n’y avait pas besoin de regarder.
5. Le geste technique du match.
La roulette de Bryan Ruiz sur Wilshere au milieu de terrain. Le meneur de jeu dégagé par Fulham au PSV Eindhoven en janvier dernier humilie les centraux anglais. Dans la moiteur de Belo Horizonte, il dégustait une vengeance qui avait respecté la chaîne du froid.
6. Le geste pourri du match.
Ils sont au nombre de 35, mais ce n’en est qu’un seul en réalité : tous les touchers de balle de Daniel Sturridge. L’homme court vite et se place bien. Mais on se demande pourquoi au bout de jambes si capables, le bon Dieu a placé des pinces pareilles.
7. Ce match m’a fait penser à…
Une remise de diplôme. Après être passé du statut de pauvre merde à celui de révélation mondiale, l’équipe costaricaine savoure aujourd’hui la sanction définitive de son très bon travail. Vainqueurs du groupe le plus relevé du tournoi, tombeurs de l’Italie et de l’Angleterre, les Ticos sont les plus beaux sans-grades du monde. Mention très bien.
Faut-il préciser que la Grande-Bretagne a été priée de répéter son année pour n’avoir obtenu la moyenne dans aucune branche ? Non. D’accord.

8. L’anecdote.
A la mi-temps, c’est joie et félicité sur la place de la République de San José. Des danseurs ambiancent la foule en maillots rouges. Des gueulées (malgré le match nul et l’interdiction de consommer de l’alcool sur la voie publique qui rend tout ceci d’un bonenfant à désespérer un hooligan). Un animateur annonce que le caméraman qui filme la foule diffuse en ce moment même en direct sur CNN Latino. Soudain, c’est la gloire. La foule s’embrase. Ça drapote, mugit, tue-tête et danse en rond. «On va faire comme si le Costa Rica marquait un but, d’accord ? Vous êtes prêts, uno, dos, tres…» crie l’animateur. Et comme un seul homme, le public docile gueule goal à s’en péter l’anévrisme.
Les plans de coupe de CNN étaient prêts. Ils n’ont pas servi, malheureusement.
9. Le tweet à la con.
C’était un tweet en carton. Brandi par deux supporters anglais dans le stade de Belo Horizonte. S’ils sont désormais à la rue en foot, les Anglais restent les maîtres mondiaux du sarcasme :
Vol vers Rio: 2000 pounds
Profiter de l’ambiance : 2000 pounds
Arriver après l’élimination : ça n’a pas de prix.
10. La rétrospective du prochain match.
Les Ticos regardent les Grecs tricoter (spectacle émouvant s’il en est) en huitième de finale. Tandis que les championnats européens ont repris en avance, pour occuper les stars anglaises, espagnoles, portugaises et italiennes, sur le pré brésilien Bryan Ruiz sert Campbell (au second poteau, as usual) à une minute de la mi-temps. 1 à 0. Les Ticos attendent la Hollande pour les quarts.
Pour le prochain match de l’Angleterre, par contre je sais pas là.

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3 Commentaires

  1. ça va leur changer de jouer contre une équipe qui n’a gagné qu’une coupe d’Europe… j’espère qu’ils resteront motivés 😀

    super article(s)!

  2. Certes. Merci pour la correction. Toutefois, l’Angleterre étant bien en Grande-Bretagne, l’inclusion peut-elle sauver la phrase ?

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