Oooohhhh Canada

Pour la première finale entre une équipe européenne et nord-américaine de l’ère des joueurs NHL (depuis 1998), le Canada va rencontrer la Suède (demain à 13h). Comme sa victoire impressionnante contre les USA l’a confirmé, le Canada est LA nation du hockey, un bolide sans pareil, prototype du hockey du XXIème siècle. Seul un miracle, toujours possible il vrai, permettrait à la Suède de barrer la route au premier doublé depuis l’Union soviétique en 1984 – 1988, soit avant que les professionnels de NHL ne puissent aller aux JO.

Au hockey, tout peut certes arriver. Et il faut toujours se méfier de l’expérience, l’intelligence et l’art défensif du jeu suédois, surtout quand « King Henrik » règne devant son but. Cependant, voici les 10 raisons pour lesquelles le Canada va battre la Suède et remporter sa deuxième médaille d’or olympique consécutive : 1. La comparaison entre les deux demi-finales est révélatrice : au niveau de la vitesse et de la qualité de jeu, le fabuleux USA – Canada était un autre sport que celui pratiqué quelques heures auparavant lors de l’insipide Suède – Finlande. Le hockey du XXIème siècle est désormais personnalisé par les trois duels Canada – USA (2002, 2010 et 2014), soit les trois matchs avec le niveau de jeu le plus élevé aux JO. En tant que fan de hockey, arrivé au terme de la rencontre, vous n’aviez envie que d’une chose : la regarder à nouveau. Tellement de gestes techniques hallucinants, de passes justes. Tout va d’ailleurs tellement vite que souvent seul le ralenti permet de comprendre la beauté et la pureté de ce qui vient de se passer. Regardez par exemple le but canadien, la superbe passe en retrait au défenseur, et le tir apparent de Bouwmeester qui était en réalité une passe en retour, la canne de Benn déjà prête avec l’angle pour la déviation. Imbattable. Le coach Bylsma l’a admis lui-même, jamais il n’avait vu 20 gars en face avec une telle vitesse, pendant 60 minutes.
2. La maîtrise de la grande glace : les coachs canadiens ont appris de leur mésaventure de Turin en 2006. Ils ont construit dès leur réunion d’été avec tous les olympiens palpables (en jouant au hockey en salle, car pour des raisons d’assurance il n’était pas possible de se risquer la glace) une équipe basée sur un système défensif, clé de la réussite sur la grande glace. Ils ont sélectionné leurs joueurs dans ce seul but, des patineurs rapides, des grands gabarits, qui patinent dans les deux sens. Ils ont choisi les défenseurs les plus sûrs et disciplinés. Ralph Krueger a été engagé en tant que spécialiste « grande glace ». C’est ce qu’on appelle mettre tous les atouts de son côté pour défendre son titre.
3. La demi-finale contre le USA est déjà vue par beaucoup de journalistes canadiens comme la meilleure performance défensive de l’histoire du Canada, un match parfait. Un chef d’oeuvre. Car en face, c’était la meilleure équipe du tournoi jusque-là et peut-être une équipe des Etats-Unis forte comme jamais. Les entraîneurs de nos moskitos, novices et juniors pourront ressortir ce match qui pourrait aussi s’intituler « How to play hockey ». Déjà que Shea Weber, Drew Doughty et Duncan Keith sont des monstres derrière. Mais que dire du travail incessant défensif des attaquants, comme Carter ou Nash. Total hockey.
4. There is no « I » in Team, qui pourrait se traduire, il n’y a pas de Je dans le mot Equipe. Les joueurs canadiens sont tous des stars. Cependant, ils ont compris que la recette du succès du hockey moderne, c’est de laisser l’ego dans le vestiaire. Ainsi, ils n’ont pas peur de se salir leurs mains, de se sacrifier pour les autres, d’oublier leurs propres stats, de rester discipliné et patient, de se mettre au service de l’équipe et de ne pas essayer de faire la différence par des exploits individuels. Contre les USA, il n’y a pas un shift qui a duré plus de 40 secondes.  The Canadian Way.  Keep it simple. Execute. Les Russes feraient bien de s’en inspirer.
5. Sidney Crosby est le meilleur joueur de la planète, et il l’a démontré vendredi soir. Il a tu ses détracteurs, qui n’avaient d’ailleurs pas saisi que même lors des matchs précédents, son apport est immense pour l’équipe, parce qu’il occupe la meilleure ligne défensive adverse, permettant dès lors des opportunités offensives pour les autres lignes, en particulier Getzlaf, Pery et Benn. De plus, avec Bergeron et Kunitz, la mayonnaise a pris et la ligne du no 87 a été éblouissante.

6. La ligne de Jonathan Toews (cette fois avec Marleau et Carter) a de nouveau accompli sa mission de neutraliser la meilleure ligne adverse, en l’occurrence Kessel, Van Riemsdyk et Pavelski. Déjà à Vancouver, le capitaine des Chicago Blackhawks avait rendu silencieux tous les meilleurs joueurs adverses, dont Malkin et Ovechkin. Entre temps, il a remporté deux Coupes Stanley (MVP des play-offs 2010 et Selke Award – meilleur attaquant défensif – 2013), rien que ça. Un tout tout grand.
7. Le Canada a peut-être disputé vendredi son match le plus impressionnant de tous les temps. Et cela sans Steve Stamkos, John Tavares, PK Subban, Martin Saint-Louis, Claude Giroux, Joe Thorton, Eric Staal, Jordan Eberle – et la liste est encore longue. Le Canada est une usine à fabriquer des hockeyeurs, sans pareil. Ce matin, la radio canadienne se demandait si Erik Karlsson, le défenseur star de la Suède et souvent comparé à PK Subban, aurait sa place dans l’équipe du Canada et le système de Mike Babcock. Probablement pas. C’est tout dire.
8. Longtemps, les observateurs avaient mis en évidence la position de gardien comme potentiel point faible de l’équipe du Canada. Cependant, Carey Price a été un roc tout au long de ce tournoi et a fait taire ses détracteurs. Il s’illustre par sa technique parfaite et un calme… olympien. Il a l’habitude de la pression, lui qui exerce le métier peut-être le plus difficile dans le monde du hockey, soit gardien des Canadiens de Montreal. Il est à une marche du trône.
9. Les dirigeants du hockey canadien ont repris pour l’essentiel le même encadrement victorieux qu’à Vancouver. Il suffit d’examiner la composition des managers et le professionnalisme exemplaire du processus pour voir à quel point les Canadiens sont à la pointe dans ce domaine : Steve Yzerman (General Manager de Tampa Bay) comme directeur exécutif, avec comme aide Doug Armstrong (GM St. Louis), Peter Chiarelli (GM Boston), Ken Holland (GM Detroit) et Kevin Lowe (GM Edmonton). Et comme coach Mike Babcock (Detroit) et assistants coachs Ken Hitchcock (St. Louis), Claude Julien (Boston), Lindy Ruff (Dallas) et Ralph Krueger, comme consultant « européen ». Depuis l’été passé déjà, un seul but: l’or olympique.
10. Voilà deux Olympiades que les Nord-Américains restent invaincus contre les équipes européennes dans les matchs éliminatoires des JO, les seuls matchs du calendrier international qui comptent vraiment et où les meilleurs joueurs du monde s’affrontent. 7 victoires pour les USA et le Canada, contre 0 pour les équipes du Vieux Continent. Ce n’est pas un hasard. Et au vu des demi-finales, il n’y a pas de raison que cela change, au contraire. De plus il manque à la Suède trois joueurs clés, Henrik Zetterberg, Johann Franzen et Henrik Sedin. Malgré cela, Les « Tre Kronor » ont réussi à déjouer le piège de leur petit frère finlandais, comme d’habitude, avec leur patience et leur intelligence habituelle. Toutefois, contre le Canada version 2014, leur présence va cruellement faire défaut.
Le Canada est la nouvelle Armée rouge. Mais cette fois le pull rouge a un drapeau d’érable.
Photos Pascal Muller, copyright EQ Images

Écrit par Andy Tschander

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5 Commentaires

  1. Excellent bravo! Démonstration stratosphérique des Canadiens! Tous les détails sont maîtrisés à la perfection: regardez comme les joueurs à la feuille d’érable entrent dans la zone à pleine vitesse en évitant le hors-jeu au millième de millimètre! Simplement hallucinant!

  2. Foutaise !

    Joli exercice d’auto-persuasion s’il en est.

    La Suède, même privée de Zetterberg et Sedin, a largement les moyens de l’emporter.

  3. Ben moi je parierais plutôt sur la Suède.
    Certes les Canadiens ont été très bons face aux Américains, mais il ne faut jamais sous-estimer les Suédois.

  4. Sur un match de hockey, tout est toujours possible. C’est une lapalissade que la Suisse a bien su démontrer (malheureusement) contre les Lettons.

    Reste que le Canada est impressionnant et au-dessus sur le papier.

    Bel article une nouvelle fois, avec des anecdotes intéressantes, merci.

    PS: Les Finlandais ont montré que les Européens peuvent battre des Nord-Américains dans les matchs qui comptent. 🙂 (même si tu me diras que pour un Américain seule la médaille d’or compte, je pense qu’ils ont quand même pas balancé ce match pour le bronze)

  5. @Damien

    Merci.

    Très juste pour FIN – USA, qui a rappelé la défaite du CAN contre la SWE à Nagano en 1998 pour le bronze. L’Or ou rien.

    Bravo à la magnifique Finlande qui voulait plus la victoire et qu’on aurait bien voulu voir en finale. Le tournoi restera marqué par leur exploit historique contre la Russie. Et Teamu Selanne, increvable et fabuleux, sera sans doute élu MVP du tournoi.

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