Trilogie pascale : la Passion

Trois pays, trois villes, trois stades, trois matchs, trois ambiances étaient au programme de mon week-end de Pâques. Le premier acte m’a conduit – quelle surprise – dans la ferveur passionnée du Westfalenstadion pour officialiser la qualification du Borussia Dortmund pour la prochaine Ligue des Champions.

Chaque été, on peut classer les ténors du foot allemand en deux catégories au moment d’énoncer les objectifs de la saison : les fanfarons et les hypocrites. Dans la première catégorie, on trouve bien sûr le Bayern Munich qui assure qu’avec juste un doublé Coupe-championnat ce sera une saison normale qui pourra être considérée comme bonne si elle s’assortit d’une victoire en Ligue des Champions, c’est sans doute pour cela que les trophées du Rekordmeister suscitent une émotion et une ferveur proches du néant. Ensuite, il y a Schalke 04 dont les dirigeants affirment chaque été que cette saison, c’est la bonne, celle du titre qui fuit Gelsenkirchen depuis 1958 ; cela fait rire toute l’Allemagne, il n’y a que les fans des Knappen pour y croire et ils sont généralement très courroucés quand leur club se retrouve largué à douze longueurs de la tête du classement après cinq journées. Enfin, il y a Wolfsburg qui est peut-être un peu plus humble depuis que le duo Hecking-Allofs a remplacé Felix Magath mais qui claque trop d’argent à chaque mercato pour qu’on ne lui prête pas de grandes ambitions. Dans la deuxième catégorie, celle des hypocrites ou des faux modestes ou des misérabilistes, il y a Mönchengladbach avec un Lucien Favre qui explique qu’il n’a pas d’équipe et qu’il faut d’abord assurer le maintien avant de regarder vers le haut. Leverkusen ne vise généralement qu’une place européenne, la C1 avec de la chance. Et puis, il y a Dortmund qui n’assume pas complètement son nouveau statut de deuxième puissance sportive et économique du foot allemand. Ainsi, le duo Hans-Joachim Watzke-Michael Zorc se contente de viser – officiellement – une qualification pour la prochaine Ligue des Champions, un bon parcours en Pokal et sortir des phases de poule en C1. C’est dire qu’en battant Mainz samedi et en assurant donc une place sur le podium et le pactole de la Pognon’s League, le BVB a atteint tous ses objectifs de la saison.  

Blasé…

Ceci dit, si les objectifs comptables des dirigeants sont importants, surtout pour un club qui met un point d’honneur à conserver des prix populaires sans dépendre d’un mécène étranger, nous ce qui nous importe, c’est de voir du spectacle, vibrer pour notre équipe et vivre des émotions. Et à ce niveau-là, on a été servis samedi. Cela commence sur le parking pour un premier apéro où je ne retrouve pas mon fan’s club allemand à sa place habituelle. Mais tout rentre dans l’ordre, ils ont juste migré de trente mètres et oublié la banderole car Thomas, son responsable, est en Australie. Puis deuxième frayeur : l’un des porteur des drapeaux de l’entrée des joueurs a fait défection en dernière minute et il semble que je sois tout désigné pour le remplacer. Mais j’ai un peu fait la fête la veille et je sens mes bras un peu flageolants pour aller agiter ce drapeau qui pèse des tonnes, je décline la proposition. Je trouve ça assez cocasse : il y a des milliers de footballeurs professionnels qui font une superbe carrière mais n’auront jamais l’occasion de fouler une pelouse pour un match à domicile devant plus de 80’000 fans et moi qui n’ai jamais joué plus haut que la quatrième ligue, je dédaigne pareille opportunité avec un très blasé «je connais déjà, je préfère aller boire l’apéro suivant avec Peter, Franz et Bernd…»

Sans temps mort

On s’attendait à voir le club jumeau et ami du FSV Mainz, la version 2.0 du BVB, débuter le match comme d’habitude avec beaucoup d’intensité et de rythme, histoire de profiter d’une fraîcheur supérieure contre un Borussia qui joue son onzième match en trente-cinq jours. Mais les Pöhler ont la bonne idée d’entamer le match à bras le corps pour calmer les ardeurs du Karnevalsverein. Avec une réussite fluctuante : pas de chance lorsque Marco Reus tire un coup franc sur le poteau, de la chance lorsqu’un tir de Milos Jojic est dévié par le bras d’Oliver Kirch pour le 1-0, pas de chance sur la frappe de Shinji Okazaki déviée par Mats Hummels pour l’égalisation. Le deuxième but du BVB lui ne doit rien au hasard car il résulte d’une splendide triangulation entre Nuri Sahin, Henrikh Mkhitaryan et Robert Lewandowski. Comme d’habitude entre Dortmund et Mainz, c’est complètement débridé et on se régale, surtout qu’un chaud soleil inonde un Westfalenstadion en ébullition, un superbe après-midi de football.

Sans trembler

Il y aura un petit coup de froid en début de deuxième période sur une passe en retrait suicidaire de Nuri Sahin qui offre l’égalisation à Shinji Okazaki. Je ne pensais pas qu’un jour un doublé d’un Shinji au Westfalenstadion nous plongerait à ce point dans la consternation. Fort heureusement, le doute n’aura pas duré plus de cent vingt secondes et Lukasz Piszczek redonne l’avantage au BVB en déviant de la tête un coup franc de Marco Reus. Si Robert Lewandowski ne trouve que le poteau, Marco Reus assurera le succès dortmundois sur un pénalty pour une main de Nico Bungert pas forcément coupable mais qui faisait suite à deux actions litigieuses dans les minutes précédentes. Le Borussia s’est un peu compliqué la vie mais il s’assure un succès somme toute assez tranquille au terme d’une rencontre spectaculaire. Mainz n’aura toutefois pas complètement perdu son après-midi : comme les deux finalistes de la Pokal sont désormais qualifiés pour la Ligue des Champions, la septième place du classement sera qualificative pour l’Europa League. Et grâce au nul d’Augsburg contre Berlin, le FSV conserve quatre points d’avance sur les Bavarois à trois journées de la fin dans la lutte pour cette septième place qualificative, c’est dire qu’il y a de fortes chances de retrouver le Karnevalsverein sur la scène européenne la saison prochaine.   

La fête

Dortmund a donc assuré l’essentiel dans cette saison. Ce qui viendra maintenant sera du bonus, soit la finale de la Pokal et sauvegarder cette deuxième place en Buli. Non pas que le titre de vice-champion présente un quelconque intérêt – ici c’est ni Genève ni Neverkusen – mais conserver la deuxième place signifierait rester devant Schalke et remporter la Ruhrpottmeisterschaft pour la quatrième saison de suite. Et ça, ça compte beaucoup pour les fans. L’ambiance était en tous les cas au rendez-vous en soirée au Lütge-Eck : j’ai à peine eu le temps de commander ma tournée de Nullneuner que j’étais entraîné au Bierkönig à l’insu de mon plein gré par mon fan’s cub alémanique présent en masse afin d’entamer cette trilogie pascale sur les chapeaux de roue.

Borussia Dortmund – FSV Mainz 05 4-2 (2-1)

Signal Iduna Park, 80’645 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Schmidt.
Buts : 6e Jojic (1-0), 14e Okazaki (1-1), 18e Lewandowski (2-1), 53e Okazaki (2-2), 56e Piszczek (3-2), 79e Reus (pénalty, 4-2).
Dortmund : Langerak ; Piszczek, Papastathopoulos, Hummels, Durm; Kirch, Sahin; Jojic (81e Hofmann), Reus (84e Aubameyang), Mkhitaryan (80e Grosskreutz); Lewandowski.
Mainz : Karius; Bell (46e Parker), Bungert, Noveski, Diaz; Geis; Pospech, Moritz (46e Saller), Malli (76e Koo), Choupo-Moting; Okazaki. 
Cartons jaunes : 8e Jojic, 39e Okazaki.
Carton rouge : 78e Bungert (sauvetage de la main sur la ligne).
Notes : Dortmund sans Weidenfeller, Subotic, Blaszczykowski, Schmelzer, Kehl, Bender ni Gündogan (blessés), Mainz sans Park, Baumgartlinger, N. Müller ni Schahin (blessés).

Écrit par Julien Mouquin

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