TSR sports, le feuilleton : 2. Bizut

Bonjour bonjour,

Mes employeurs m’ont annoncé que mes premières investigations avaient rassuré leurs clients. Il y a paraît-il eu, depuis quelques jours, de nombreuses inexactitudes et une moins grande concentration de la part des présentateurs. Si bien qu’ils ont pensé que ces quelques problèmes étaient la conséquence d’une activité en coulisse visant à réaliser un mauvais tour à CartonRouge.ch.

Bon, je peux tout de suite vous rassurer. C’est vrai qu’on a eu pas mal à faire ces derniers temps, mais ce n’est aucunement parce que la rédaction, dans son entier préparait un coup. Maintenant, je peux vous dire que s’il y a une action qui est menée, elle n’est en tout cas pas organisée par la TSR. Ce serait une initiative privée. Et même… je crois que les gens ont mieux à faire que de préparer des trucs comme ça. Vous savez, j’ai appris des choses fondamentales ces derniers jours. Pour comprendre quelque chose au sport, il faut d’abord comprendre ce que c’est que le loisir. Sinon, tu ne feras jamais un bon journaliste sportif. Si tu veux être bon, si tu veux faire vibrer les gens, il n’y a qu’un seul leitmotiv : s’a-mu-ser. Ici on appelle ça le «fun», c’est de l’anglais à la base.D’un autre côté, c’est marrant, parce que le fun, les gens ici ne le voient pas tous pareil. C’est vrai qu’il y a différentes générations, des passionnés de différentes disciplines, des caractères assez forts et des aptitudes au consensus plus ou moins marquées. En tout cas j’ai remarqué que mes collègues avaient plusieurs manières d’atteindre un haut niveau de passion sportive. Pascal, par exemple, est attiré par ce qui lui rappelle les activités dans lesquelles il se trouve bon. Quelques fois par jour, il balance un objet sphérique pas totalement identifié dans le couloir et il gueule «strike !». S’il refuse catégoriquement de dire où il a trouvé cette boule, une rumeur affirme qu’il s’agirait d’un élément du plateau de «Racines» qu’il aurait récupéré en douce lorsque l’émission a été déprogrammée. Dans le rôle des quilles, on retrouve les poubelles pour les différents types de déchets. Et dans le rôle de celui qui va devoir tout ranger, on retrouve celui qui, aux yeux des autres, doit encore montrer que sa place dans la maison est légitime «puisqu’il était encore bien trop jeune pour se souvenir de la dernière fois qu’une équipe romande est devenue championne suisse de hockey». Par cette déclaration de Pascal vieille d’une semaine, vous aurez reconnu sans peine Romain Glassey, alias Bizut.


Devine qui vient de me lancer
une roue dessus ? © TSR

Ces jeux intergénérationnels au bureau mettent la bonne ambiance aux yeux de certains. Certes, mais le chef, bien que son humour soit un peu comme celui de Pascal à mon avis, n’a pas envie de passer pour celui qui est trop laxiste. Alors aujourd’hui, tel un capitaine déterminé à faire porter un slip sur la tête à l’une de ses recrues choisies au hasard, histoire de faire trembler les autres et imposer son autorité, il est sorti de son bureau. Et puisque Romain, alias Bizut, était au milieu d’un sol jonché de bouteilles de verre et de gobelets à café, c’est vers lui que les foudres du Zeus de la Tour ont pointé. Il a beau eu dire qu’il n’avait rien fait, ça n’a pas empêché le boss de lui hurler dessus et de dire que quand le Maestro sera là, c’en sera fini des pauses café et que la bande de gros malins qui ne pouvait s’empêcher de faire passer le service des sports pour une ménagerie allait pouvoir jouer comme les otaries avec leur boule et peut-être aussi avec certaines têtes qui allaient tomber. Pendant ce temps, Pascal faisait des clins d’oeil complices à Marie-Laure, un peu gênée par la situation. Mais personne ne voulait encore paniquer car les têtes qui tombent, on connaît bien dans le département. Cela s’appelle la retraite.
Tout aurait pu s’arrêter ici, si ce diable de Paratte n’était pas absent, comme à son habitude. Le chef voulait absolument savoir pourquoi il n’était pas là et il menaçait d’interroger des gens séparément. C’est toujours la même chose. Quand on est dans une équipe, il suffit d’un élément qui ne prenne pas complètement sa tâche au sérieux pour que les autres trinquent. Et puisque c’est au figuré, on s’en vante moins qu’au propre dans la rédaction. Pascal a voulu détendre l’atmosphère en demandant si ce n’était pas aujourd’hui la «Lake Paratte» en ajoutant que «ça expliquerait son absence». Suite à cette «sortie», il est resté tout à fait sérieux et a repris son travail. Mais on voyait bien au bout d’un moment que son bon gag le faisait beaucoup rire intérieurement. La double attente, soit celle d’une détente de l’atmosphère suite à la plaisanterie et celle qui concernait le spécialiste du grand pont labial finirent par n’en former plus qu’une, pesante et chaude, comme pouvaient en témoigner les auréoles sous les aisselles de Jean-Marc Rossier.
Puis, ce diable de Paratte est arrivé, quelques instants plus tard, essoufflé, s’excusant de cette courte absence et expliquant qu’il était allé à la bibliothèque des Pâquis pour se documenter pour un match la semaine prochaine. Enfin, il a dû monter les escaliers tellement vite que cela lui a pris six tentatives de le dire. Ces explications ont donné un prétexte pour que le chef rejoigne son bureau puisqu’il avait pu vérifier son autorité, ce qui est toujours utile au cas où il y aurait une inspection.
On s’attendait à une réaction pleine de violence de la part de Romain qui avait été, une fois de plus humilié. Contre toute attente, il est resté impassible, pas un rictus, aussi immobile qu’un pou prisonnier dans du gel, tel Oetzi le fut des glaces. La scène était pleine de tension. Mais, pour le plus grand désarroi de Jaton qui avait misé 200 francs sur une victoire par KO de Droz et le plus grand bonheur de Maïque qui s’était improvisé bookmaker, il ne se passa rien.
 
Il faut dire que Bizut en a vu d’autres. Depuis son «intégration» aux sports, on le teste pour voir s’il est vraiment motivé. Ça a commencé par le combat des Reines. J’ai entendu que Pierre-Alain et Jean-François avaient préparé le coup ensemble. Compte tenu que Bizut possède un patronyme valaisan, il lui aurait été impossible de refuser de commenter l’événement sans que des représailles s’exercent en haut à Nendaz sur sa famille. Ce serait d’ailleurs pour éviter de vexer les cadors du vieux pays, qu’il aurait fait preuve d’un vif intérêt pour cette merveilleuse discipline. Mais selon ce que je vois au travail, Bizut est plutôt branché nouvelles technologies et Tony Hawk que Simmental et Holstein. Enfin, cela aurait pu s’en arrêter là et ils auraient pu le mettre à quelque chose de convenable. Mais non !

Suspense et bravoure © Chablais tourisme

Ils ont décidé de monter une épreuve suprême pour voir si la jeune pousse était vraiment déterminée à faire partie des Leurres*. D’un côté, je comprends PA et JF. Etre journaliste, d’accord, mais journaliste sportif, ça demande le fun. Mais lorsque Pierre-Alain a affirmé, en sa qualité que chef de la rubrique foot, que «dans le journalisme sportif, c’est comme dans le foot, tout peut aller très vite. Et Bizut ce qu’il VALAIT dans la presse écrite, ça m’indiffère car ce qui compte vraiment, c’est ce qu’il VAUT». C’est à ce moment précis que je me suis rendu compte qu’il n’y a pas que les producteurs de lait qui jouaient avec les mots et qui étaient fiers de leur petit coin de terre.
Alors, au lieu d’amener de la fraîcheur au niveau des commentaires du foot, ils se sont arrangés, grâce à un brillant sens rhétorique, pour amener – et ceci sans laisser aucune trace de transfusion -du sang neuf à une épreuve qui en avait bien besoin : le Tour de France. Si vous vous demandiez si les combats d’Aproz peuvent pleinement être considérés comme un sport, vous êtes obligés de faire de même devant cette épreuve.
Pour les aptitudes cognitives des participants, cela laisse déjà songeur. Il n’est pas si loin le temps douloureux pour les amoureux de la petite reine où le commun des mortels pensait que les produits dopants de type EPO et PFC avaient des effets psychotropes. C’est vrai, on ne remerciera jamais assez la brillante éloquence de coureurs tels que des Virenque, Dufaux, Indurain, etc. et surtout l’excès de confiance en soi «vandammien» de Pascal Richard.

Laurent Dufaux, c’est magnifiiiiiique !

Et pour le suspense… On dit que dans certains sports mécaniques, la course se passe dans les écuries. En vélo, elle a plutôt l’air de se passer en garde à vue et bien après la ligne d’arrivée. Emmener un braquet, avoir une fréquence de pédalage, ce sont des termes qui désignent des éléments très superficiels de la science cycliste. Enfin, je m’emporte. Je n’avais pas songé à quel point le fait de partager le quotidien de grands professionnels de la télé me donnerait la passion sportive. Mais je sais que ma vie est celle d’un espion. C’est une affaire de vocation et c’est illusoire de penser que l’on peut pratiquer un métier tel que le journalisme sportif par simple nécessité pécuniaire.
Enfin, puisque je suis tout de même payé pour fournir des informations, je peux vous annoncer que l’on a appris par Grivel, dont les entrées au CIO sont notoires, que le minigolf artistique serait sur le point de devenir discipline de démonstration pour les Jeux de 2016. Vous ne devinerez jamais qui est pressenti pour le commenter…
Bon, je vous laisse, dans deux heures et quelques, c’est le direct…

* Société regroupant les commentateurs sportifs les plus doués, sorte d’équivalent du commando des Marines dans l’armée américaine. Le nom a utilisé pour la première fois en 1974 à Sapporo aux  JO, durant une épreuve de biathlon. Le critère d’admission est le suivant : Se montrer brillant durant la nuit lors d’un mouvement de troupes munies de dossards. Je vous expliquerai une prochaine fois…


Si tu as raté le premier épisode :

TSR sports, le feuilleton : prologue

Écrit par Jean-Boris Cochet-Lamouche

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4 Commentaires

  1. « …les têtes qui tombent, on connaît bien dans le département(des sports). Cela s’appelle la retraite. » Excellent les gars, excellent !!!

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